Prédication 18 décembre 2022 (Matthieu 1.1…25)

chapô

Prédication du 18 décembre 2022 (Matthieu 1.1...25)

Matthieu 1.1…25
Généalogie de Jésus-Christ, fils de David, fils d’Abraham.
Abraham engendra Isaac ; Isaac engendra Jacob ; Jacob engendra Juda et ses frères ;
Juda, avec Tamar, engendra Pharès et Zara ; Pharès engendra Hesrom ; Hesrom engendra Aram ;
… Jacob engendra Joseph, l’époux de Marie, de laquelle est né Jésus, celui qu’on appelle le Christ.
Il y a donc en tout quatorze générations depuis Abraham jusqu’à David, quatorze générations depuis David jusqu’à l’exil à Babylone, et quatorze générations depuis l’exil à Babylone jusqu’au Christ.
Voici comment arriva la naissance de Jésus-Christ. Quand Marie, sa mère fut mariée à Joseph ; avant qu’ils s’unissent, elle se trouva enceinte de l’Esprit saint. Joseph, son mari, qui était juste et qui ne voulait pas la dénoncer publiquement, décida de la répudier en secret. Comme il y pensait, l’ange du Seigneur lui apparut en rêve et dit : Joseph, fils de David, n’aie pas peur de prendre chez toi Marie, ta femme, car l’enfant qu’elle a conçu vient de l’Esprit saint ; elle mettra au monde un fils, et tu l’appelleras du nom de Jésus, car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés.
Tout cela arriva afin que s’accomplisse ce que le Seigneur avait dit par l’entremise du prophète : La jeune fille sera enceinte ; elle mettra au monde un fils et on l’appellera du nom d’Emmanuel, ce qui se traduit : Dieu avec nous.A son réveil, Joseph fit ce que l’ange du Seigneur lui avait ordonné, et il prit sa femme chez lui. Mais il n’eut pas de relations avec elle jusqu’à ce qu’elle eût mis au monde un fils, qu’il appela du nom de Jésus.
Prédication
Tout le monde connaît cette histoire de la naissance de Jésus par cœur. Histoire à la fois banale et tout à fait originale. Je vous laisse le soin de déterminer ce qui est banal ou original…
En effet, l’enfant Jésus a peut-être été conçu un peu plus tôt que prévu… car nous dit-on, la toute jeune Marie était enceinte au moment des noces. Et ce pauvre Joseph, descendant d’une lignée royale fait profil bas et garde Marie comme épouse ; c’est un ange de Dieu qui lui a soufflé ce comportement aimable nous dit-on.
En réalité, c’est assez amusant, parce qu’il y a un détail qui fait mal, ou du moins qui interroge dans cette histoire telle que racontée par Matthieu. De qui est la longue généalogie du début de l’évangile de Matthieu ? De Marie ?
Non, c’est la généalogie de Joseph. On a lu au verset 16 :
Jacob engendra Joseph, l’époux de Marie, de laquelle est né Jésus, celui qu’on appelle le Christ.
Pourquoi donc se donner la peine de citer toute la généalogie de Joseph pour dire à la fin : ce Jésus n’est pas de lui… ! Par ailleurs, cette remise en question de la paternité de Joseph met à mal l’attente d’un messie fils de David, ce que Jésus serait bien en descendant de Joseph. Mais enfin… Sortons des questions de généalogie et intéressons-nous à la parentalité, puisque c’est finalement de cela dont il est question ; en acceptant Marie comme épouse, Joseph accepte Jésus comme fils. Joseph devient père de Jésus. Et ça tombe plutôt bien en regard de l’attente du messie, fils de David. Donc tout semble rentrer dans l’ordre…

Pourtant, une autre chose est étonnante dans cette famille de Joseph, Père de Jésus. Il descend d’une lignée royale qui est entachée de scandales ; ses ancêtres ne sont vraiment pas que des saints : Joseph descend de David, violeur tueur, d’une prostituée… d’un autre meurtrier…
Du coup, à la lecture de la généalogie de Joseph, on aurait presque envie de dire : heureusement que les auteurs des évangiles ont eu la brillante idée d’un autre père pour l’enfant Jésus… ! Un peu plus respectable ! Un peu plus saint ! Parce qu’un fils de Dieu peut-il sortir d’une famille à scandale ?
Il faut croire que oui, Dieu ne fait pas naître son fils dans une famille parfaite, mais au cœur du monde, car il est destiné à vivre dans le monde, pour le monde.

Au delà des petites incohérences du texte qui tendent à écarter par moment Joseph de la paternité, c’est la question de l’identité de Jésus et surtout de sa mission qui est en première ligne.
Parce que finalement dans Matthieu, on se fiche de Marie qui n’est qu’une jeune fille enceinte, et on se fiche pas mal de Joseph aussi (un peu moins quand même), pour arriver à l’essentiel :
au verset 20-21 : L’enfant qu’elle a conçu vient de l’Esprit saint ; elle mettra au monde un fils, et tu l’appelleras du nom de Jésus, car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés.

Dans Matthieu, la mission de Jésus est donnée avant même son arrivée, sa naissance : c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés.
En ce qui concerne son peuple, il n’est pas question du peuple d’Israël, mais de son peuple à lui Jésus, qui, on le découvrira au fil du ministère de Jésus, est composé de juifs, de non-juifs, de personnes connaissant déjà Dieu ou le découvrant en rencontrant Jésus. Le peuple de Jésus est donc cette quantité énorme de personnes, hier et aujourd’hui qui, à un moment donné de leur vie, vont être sauvées par Dieu grâce à Jésus.

Que veut dire que Jésus sauve, nous sauve ou me sauve de nos péchés, de mes péchés ?
Je crois que l’expression « les péchés » englobe tout ce qui fait obstacle à la vie voulue par Dieu pour tout humain : vie plus forte que la mort, vie emplie d’espérance et de fraternité, vie renouvelée selon les enseignements de Jésus Christ, lui que l’on découvre libérateur et Sauveur dans les évangiles.
Les péchés en question (liste non exhaustive), vous les découvrirez à la fin de chaque phrase : Jésus me sauve de…

Dans un premier temps, Jésus nous/me sauve de l’éloignement de Dieu puisque ce Dieu qui était fort loin, s’est rendu proche avec Jésus. On dit souvent que Dieu s’est fait homme avec Jésus ; on parle d’incarnation, ce qui une manière de dire que Dieu est pleinement présent en Jésus Christ. Pour nous, il est vrai qu’il est beaucoup plus aisé d’avoir un Dieu incarné, humain, dont on nous raconte l’histoire, qui a rencontré, enseigné, mis en route certains personnages des évangiles qui nous ressemblent, dans lesquels nous pouvons nous reconnaître. Dieu Jésus met fin à l’éloignement d’un Dieu inaccessible aux humains ; il restaure, il renouvelle la relation avec Dieu.

Dans un second temps, Jésus nous/me sauve du silence de Dieu.
Avant Jésus, on avait un Dieu qui donnait sa parole au travers de messagers souvent récalcitrants, par exemple les prophètes. Il faut préciser que la fonction d’un prophète est de délivrer un message de la part de Dieu, mais sa première caractéristique est de désobéir à Dieu et de refuser la mission.
Donc avec des messagers inconstants, la tâche de Dieu est complexe… !
Avec Jésus, son fils, animé dès sa conception par l’Esprit, et présenté né de l’Esprit, on peut s’attendre à une fidélité parfaite,au Père. Et on n’est pas déçu, Jésus vit parfaitement en relation avec Dieu. En Jésus, Dieu se fait connaître de manière beaucoup plus facile pour nous, puisqu’il est venu au milieu des humains pour expliquer Dieu, dire son message d’amour et sa perspective de salut pour chacune et chacun de nous ; ce qui nous permet de dire : Dieu n’est pas muet, il s’exprime par Jésus Christ, qui d’ailleurs prend le nom de Parole dans l’évangile de Jean.

Dans un troisième temps, Jésus nous/me sauve de la crainte de Dieu.
Avec Jésus qui guérit, discute, restaure, donne la vie… et bouscule les coincés et les méchants, l’image d’un Dieu terrible s’efface. Nous ne sommes plus des « craignant-Dieu », nom donné au petit peuple hébreu, mais nous sommes des « aimant-Dieu », ou des croyants en Dieu, ce qui au passage est assez imprécis, puisque nous sommes plus spécifiquement appelés des croyants en Christ : des chrétiens.

Et pour finir, Jésus sauve, nous sauve ou me sauve du commerce avec Dieu.
En effet, la naissance de Jésus renouvelle l’économie du salut. En perspective protestante, la grâce est donnée, nous sommes sauvés dans le sens de libérés de tout accablement et de toute culpabilité par pure grâce ; Paul ajoutera que nous sommes sauvés au moyen de la foi, ce qui n’est pas toujours une condition nécessaire dans les exemples de guérison réalisées par Jésus. Jésus sauve gratuitement, au bénéfice d’une rencontre, la plupart du temps sans interrogation, ni sur la quantité ni sur la qualité de la foi. En Jésus, par Jésus, Dieu me libère du commerce du pardon ou de la résurrection (fait d’être relevé d’une épreuve).

Vous pourrez réfléchir à d’autres développements à partir de « Jésus nous/me sauve de… »
par exemple, Jésus me sauve de mes fatalismes, de mes enfermements, de mes certitudes, de mon scepticisme…
Jésus est « ce Dieu avec nous », celui qui nous sauve car il nous libère de tout ce qui aliène, rabougrit, amoindrit la vie voulue par Dieu. J’aime à penser que sa proximité est une chance car il est tout prêt pour nous pousser (ou tirer) vers la vie, en particulier nous pousser pour vivre avec les autres, tous les autres.
Amen.

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